Cet article se propose d’étudier le genre de l’autoportrait dans l’art du peintre figuratif américain Andrew Wyeth (1917-2009). Malgré une carrière extrêmement prolifique de plus de soixante-dix ans, Wyeth n’a peint que quatre tableaux officiellement intitulés « autoportrait ». Wyeth réalisa le tout dernier d’entre eux, The Revenant en 1949. Même si le genre de l’autoportrait n’est pas clairement indiqué dans le titre, Wyeth a déclaré à maintes reprises qu’il était bien l’homme figurant sur le tableau. Puis jusqu’à sa mort en 2009, Wyeth élabora un genre extrêmement personnel et intime que nous pourrions définir comme des « autoportraits déconstruits ».
Nous nous attacherons dans un premier temps à étudier le genre de l’autoportrait (en tant que sous-catégorie du genre du portrait), défini traditionnellement comme le portrait d’une artiste par elle-même, principalement au travers de supports, tels que la peinture, la photographie, le dessin ou la sculpture, qui représente et reconstruit à la fois l’apparence physique d’une artiste. Dans un second temps, nous analyserons l’évolution du genre dans une perspective relative à l’histoire de l’art, et également grâce au cadre théorique de la psychologue sociale qui établit trois approches concernant la représentation de soi. Pour finir, nous nous interrogerons sur les motivations (conscientes ou inconscientes) qui ont poussé l’artiste à rejeter toute forme de représentation littérale de lui-même et à se représenter uniquement sous forme d’images à caractère métaphorique. Wyeth a souvent insisté sur le sens profondément intime et métaphorique de ces images qui trahissent la subjectivité problématique de l’artiste. Tout en déconstruisant sa propre image et en proposant une représentation complexe et fragmentée de l’identité d’un artiste, Wyeth a également interrogé plus largement le genre de l’autoportrait, dans le cadre de la tradition artistique et comme forme d’expression culturelle codifiée, propre à chaque époque.