Cormac McCarthy’s Blood Meridian: The Desert (of the) Real and the Writing of the “Hallucinatory Void”
Mots-clés :
Cormac McCarthy, Désert, Allégorie, Rhétorique, SensRésumé
Western métaphysique violent, aux allures de fable, mais néanmoins scrupuleux vis-à-vis de l’histoire et qui met en déroute toutes ces étiquettes génériques par son style excessif, Blood Meridian, le roman peut-être le plus célèbre de Cormac McCarthy, fait la part belle aux déserts du sud-ouest américain et du nord du Mexique. En effet, ces territoires qui, au milieu du XIXe siècle, furent le théâtre de conflits liés à l’expansion impérialiste, sont présentés de manière à la fois descriptive, allégorique, naturaliste et historique. Appréhendé tel un espace, et non pas simplement comme le décor inerte dans lequel McCarthy déconstruit la violence de la frontière, le désert fonctionne simultanément comme un lieu vide qui nourrit un fantasme politique et comme le vide qui menace d’anéantir ce fantasme. Mais alors comment représenter l’espace prétendument vide du désert ? Écrivain de romans qui remettent en cause de manière cinglante les mythes structurant de l’Amérique, et de fables grotesques et comiques qui sont empreintes de désespoir existentialiste et naturaliste, McCarthy a concédé que, malgré les prouesses littéraires de ses (re)créations fictives, « les livres sont faits de livres ». Sans nier la dimension éthique et ontologique évidente de son œuvre, le véritable désert de Blood Meridian est aussi, inévitablement, un désert textuel, c’est-à-dire, non seulement un texte sur le désert mais également un texte qui est un désert. À ce titre, le roman tisse inévitablement par son intertexte, des « inversions sans fin » pour donner corps à sa propre vision du désert du réel, pour reprendre un slogan baudrillardien. En effet, cette vision presque postmoderne de la nature simulée de la réalité est l’une des visions proposées par le roman, notamment par le biais de sa figure démiurgique, le Juge Holden. Mais cette atteinte un peu facile à l’endroit des descriptions réalistes assez impressionnantes du roman est contrée par le désespoir naturaliste sombre du roman qui, lui, nous renvoie au vrai désert et aux exactions humaines qui y sont perpétrées. En ce sens, l’« absolu du désert » de McCarthy ne nous dispense pas de la nécessité de revenir au réel que le texte suggère, qu’il s’agisse du réel entendu comme contexte historique ou de l’Autre bien réel que l’histoire pourrait chercher à congédier. En même temps, ce texte sur le désert n’exige aucune désertion du texte pour réaffirmer le « désert réel ». Il nous oblige plutôt à être attentif à cette « étrange sérénité » du réel que nos médiations textuelles, historiques et figuratives, ravagent et respectent tout à la fois. Dans ce roman, le désert devient cet étrange espace intertextuel mais aussi presque trans-textuel où les traces textuelles se rencontrent et les textes rencontrent d’autres textes, et aussi, où les textes vident le monde et le remplissent, par des moyens littéraires et politiques ambivalents, tandis qu’ils tentent d’en rendre compte.
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